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MÉRIDA

Dossier médical

Ménopause précoce à 31 ans.

Sa vie

« Je suis d'Amérique du sud. Je suis fille unique, j'aurais aimé faire partie d'une fratrie. J'ai eu une enfance de solitude, cette solitude a été une souffrance. Mon père travaillait à l'étranger et pouvait rester absent un ou deux ans, j'ai beaucoup souffert de ces absences, quand il partait c'était la catastrophe, un véritable abandon à chaque fois. J'ai eu son amour mais sa tendresse m'a manquée. Ma mère travaillait beaucoup, elle avait un caractère difficile, elle était dure avec moi, elle avait quitté son pays pour avoir du travail, je ne connais pas sa famille, je n'ai vu ma grand-mère maternelle que 2 fois. J'ai eu mes premières règles à 13 ans, ensuite mes cycles ont été irréguliers de 30 jours à 6 mois. Une fois, quand j'avais 15 ans, ma mère m'a emmenée chez le médecin pour savoir si je n'étais pas enceinte, alors que je lui avais dit ne jamais avoir eu de rapports, j'ai été très choquée. Le sexe était tabou à la maison, il était toujours associé à une connotation négative. Je sais que ma cousine a été enceinte à 22 ans et la grossesse a été découverte seulement à 7 mois, ce qui a été très difficilement accepté par toute la famille. J'ai eu mon premier rapport sexuel à 18 ans, j'ai beaucoup pleuré à cause de la culpabilité, j'avais l'impression d'avoir fait quelque chose de mal et il m'était très difficile de faire quelque chose de mal. Quand j'étais enfant, j'ai toujours vécu dans la quête constante de bien faire, ma mère me l'intimait, une copine qui avait de l'ascendant sur moi également et un oncle autoritaire me reprochait de ne jamais faire assez bien, il n'hésitait pas à m'engueuler. A 18 ans j'ai fait une découverte très surprenante, je suis tombée sur un document révélant que ma mère avait été mariée une première fois et avait divorcé, ce que j'ignorais. Je lui en ai voulu de ce secret et j'ai appris un peu plus tard que ma mère avait subi une IVG. Quand j'avais 19 ans ma mère est partie travailler à l'étranger pendant 2 ans. J'ai vécu son départ comme un abandon et en même temps que la perte de ma mère je perdais ma grand-mère qui sombrait dans une maladie d'Alzheimer. Ma mère n'était pas là lors de la remise de mon premier diplôme, ce qui a été difficile pour moi.

En plus de ce sentiment d'abandon il y a eu la peur, la vie en insécurité. L'insécurité familiale, car l'entente entre mes parents était complètement dysfonctionnelle, seulement dans les apparences on était une famille, mon père trompait ma mère, il était avec plusieurs femmes. Je sais que mes parents n'ont plus de rapports sexuels depuis que j'ai 23 ans. Ce n'est pas le modèle de famille que j'aimerais avoir. Et puis l'insécurité dans mon pays qui y règne de plus en plus depuis que j'ai 15 ans, j'y ai subi plusieurs agressions. La première agression à 16 ans dans un parking, un homme m'a volé mon sac, et il m'a touché sciemment les seins avec un geste sans ambiguïté. Un peu plus tard dans une favela, dans une voiture, un homme a volé l'alliance de ma mère. Une autre fois dans une maison de vacances, nous étions une dizaine de copains, une bande de 7 hommes armés ont fait irruption dans la maison, ils ont arraché les chaînes portées au cou, ils ont frappé les hommes sur la tête avec leurs armes, ils nous ont tous mis dans une chambre, ont pris 2 otages qu'ils ont emmenés, ils m'avaient choisie comme otage, mais je tremblais tellement de tous mes membres qu'ils ont choisi quelqu'un d'autre. J'ai très mal vécu ces agressions à cause de la violence, de la peur qui se met en nous. Depuis je suis toujours inquiète, je vis mal au quotidien, la peur me paralyse, la nuit je dors mal, je ne fais jamais une nuit complète en continu et par périodes j'ai de vraies insomnies. Cette insécurité m'a incitée à quitter mon pays à l'âge de 25 ans. Ma grand-mère paternelle elle aussi avait quitté son pays, à cause de la peur. Elle racontait son vécu de la seconde guerre mondiale, elle en racontait la peur, le bruit d'explosion des bombes, les courses pour aller se cacher. »

Sa réflexion

« Ma ménopause précoce est sûrement due pour une part à mon terrain génétique, ma mère a été ménopausée à 37 ans, et probablement aussi à ma peur omniprésente. J'ai pu bloquer ma fertilité car à une certaine époque de ma vie, la grossesse était une vraie peur, voire une terreur pour moi. D'abord le traumatisme de ma visite chez le médecin à 15 ans, emmenée par ma mère, ensuite entre 18 et 25 ans cette peur de la grossesse accompagnait tous les rapports, j'y pensais toujours quand j'en avais, j'avais peur d'être enceinte d'un homme qui ne serait pas mon mari, ou bien d'une grossesse avant le mariage. Je pensais au regard que la famille poserait sur moi si cela arrivait, il fallait éviter de décevoir la famille par une grossesse inappropriée, cela a été très fort, très présent. Y-a-t-il aussi en plus un lien avec le secret de ma mère ? Il y a aussi la peur de la violence du monde, la peur qu'on me fasse du mal, la peur d'être oubliée. 

Et puis il y a l'angoisse, l'angoisse qui m'accompagne depuis mon enfance de mal faire les choses, qui peut être transposée au bébé. Cette angoisse est assez forte pour faire passer mes propres besoins après les choses que j'estime avoir à faire, dans mon travail par exemple. Cette angoisse est à 8/10. »

Tous les noms propres ont été anonymisés.